DEEP / Carole Douillard

Crédit photographique : Stéphane Bellanger
Crédit photographique : Stéphane Bellanger
Crédit photographique : Stéphane Bellanger
Crédit photographique : Stéphane Bellanger
Crédit photographique : Stéphane Bellanger

Exposition du 23 mai au 28 juin 2008

le projet

Cette proposition programmatique de Carole Douillard s’offre en trois parties : conférence, exposition, performance documentaire ; DEEP conduit une revendication commune de l’artiste et d’Entre-deux : persister à agir dans ce qui est appelé communément « l’espace public ».
Notre attachement mutuel à ces formes fluides, immatérielles, ponctuelles, réside dans leur capacité de réaction. La présence du corps combinée à la possible immédiateté d’un acte confèrent à la performance une force inégalée par l’objet d’art en général.
En choisissant la performance, Carole Douillard marque son engagement personnel en tant qu’individu et artiste ; l’usage du corps comme moyen de confrontation lui permet d’acter ses résistances aux formes (spaciales, culturelles) imposées.

le contexte de l’invitation

La performance comme forme d’œuvre d’art public est rarement envisagée par les collectivités dans le cadre de commande publique par exemple. Pourtant l’utilisation du corps dans un rapport critique à l’espace  (privé ou public, urbain ou rural, culturel et social et politique) est non seulement pertinent mais indispensable. Malgré l’évidence du corps comme vecteur universel, la performance est peu conviée dans ces cadres officiels ; elle est desservie par sa caractéristique ontologique : l’immatérialité. Sa particularité est également une faiblesse pour tout commanditaire, collectionneur attaché à l’objet, à la pérennité.

biographie de l’artiste

Carole Douillard déroule son œuvre par juxtaposition d’épreuves de vie, de rencontres, d’espaces.
Son corps et celui des autres concrétisent pour un temps donné les présences possibles entre l’homme ou la femme, les lieux (salle de concert, galerie, appartement) et ses spectateurs in situ.
A l’opposé d’une idée reçue assimilant la performance à des actions expressionnistes, Carole Douillard calme le jeu que peut lui imposer un lieu et son contexte, réussit à ralentir le mouvement jusqu’à l’immobilité. Cette tenue du corps engourdi dans une position précaire peut s’avérer, en plus de l’acte performatif, une proposition formelle avec un espace construit et architectural (Suspended, 2006). Lors d’une manifestation urbaine charriant des milliers de personnes, Carole Douillard essaie de s’endormir à même le sol d’une galerie parisienne. La vulnérabilité d’une personne couchée, couverte d’un seul manteau, trouble un temps l’ambiance insoucieuse et détachée du festival
(A Sleep, 2005).

Historiquement la performance entretient des liens particuliers avec le design graphique ; sa visibilité à la fois spectaculaire et éphémère pousse l’artiste à penser la forme de l’invitation à l’adresse du public (tracts, affiches). La typographie même sera doublement pensée  par des artistes performers car elle est à la fois informative et support de parole publique (Karawane, Hugo Ball, 1916).
Plusieurs performances antérieures de Carole Douillard se sont traduites par un geste graphique : un mot associé à une typographie. En 2006, elle trace un Wall-writing, en squattant la cimaise d’une exposition en cours de démontage ; elle y peint le mot Racaille en police Putain. Dans la vitrine de la galerie Miss China à Paris, un SALOPE manuscrit s’adresse aux passants.
En réponse à l’invitation d’Entre-deux, Carole Douillard convie le graphiste Benjamin Dupoué à se joindre à elle pour réfléchir à certains aspects du projet : invitation, mode d’inscription du mot sur un mur de la Base d’appui.

l’exposition à la base d’Appui d’Entre-deux

La performance documentaire que Carole Douillard amorcera dans le lieu d’Entre-deux engagera le mot, la parole, comme restitution de performances antérieures. Ici, l’oralité du mot sera pensée comme forme de document, d’objet (?) d’une performance. Ce vide apparent laissé entre le moment de l’acte performatif et son témoignage génère une qualité propre basée sur le souvenir qui n’est pas sans effet sur le spectateur mais aussi sur l’artiste. C’est cette mémoire qui sera racontée lors de la performance documentaire. À l’éternelle question de ce qui reste après une performance associée à sa valeur marchande, l’idée de la performance documentaire que Carole Douillard propose est une alternative doublement intéressante aux objets convenus : photographie, vidéo, dessin préparatoire… ; elle offre une restitution associant forme artistique et document.